Faut-il arrêter de produire de l'huile de palme ?

L’huile de palme représente aujourd’hui 25 % de la consommation d’huile mondiale, ce qui fait d’elle l’huile la plus consommée. On la trouve partout autour de nous, dans l'alimentation ou encore les cosmétiques. Pourtant, ses conséquences sur l’environnement sont loin d’être anecdotiques. Décryptage.

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Résumé de l'article

L'huile de palme est aujourd'hui difficile à égaler en termes de rendement. Elle est la cause de nombreux problèmes environnementaux, économiques et sociaux. En entraînant une déforestation massive, elle met en danger les écosystèmes et les populations locales. Mais il ne faut pas pour autant arrêter de produire de l'huile de palme. La solution réside dans une production responsable et durable de cette huile, à travers des cultures ne contribuant pas à la déforestation massive. L'approvisionnement responsable en huile de palme est donc un défi majeur pour les années à venir. Cela concerne aussi bien les producteurs que les consommateurs, en passant par tous les intermédiaires.

L’huile de palme est une huile végétale, comme l'huile d'olive ou de tournesol, extraite de la pulpe des fruits du palmier à huile (Elaeis guineensis). Il s'agit de la matière grasse la plus consommée au monde.

Aujourd'hui, près de 80 % de l’huile de palme est destinée à l'industrie agroalimentaire. Bien entendu, cela touche certaines pâtes à tartiner, mais aussi des plats préparés ou surgelés comme les pizzas, les nuggets ou les frites. C'est sans compter sur certaines brioches, fromages ou gâteaux apéritifs. En bref, on en trouve partout. Dans un supermarché, quasiment la moitié des produits alimentaires contiennent de l'huile de palme.

19% de l'huile de palme produite au niveau mondial est utilisée pour l'oléochimie, à savoir les cosmétiques (shampoings, mascaras, gels douche, etc.) ou les bougies par exemple. Le dernier  % est utilisé pour les biodiesels. Mais au niveau européen, environ 45% des volumes d'huile de palme importés sont dédiés aux agrocarburants.

L'huile de palme est majoritairement produite en Indonésie et Malaisie, avec plus de 85% de la production mondiale. Les 15% restants sont produits dans certains pays tropicaux d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Entre 1994 et 2014, cette production a été quadruplée. Pour un total de 65 millions de tonnes. D'ici 2030, les volumes pourraient même être deux fois plus importants que ceux de 2000.

En Malaisie, la surface des palmeraies est en constante augmentation. Par exemple, entre 2000 et 2010, elle a gagné 1,53 million d'hectares. Actuellement, il manque toutefois de transparence et de traçabilité dans le secteur de l'huile de palme.

Peu coûteuse, la production d'huile de palme n'a cessé d'augmenter depuis le début des années 1990. La tonne d'huile de palme représente 200 dollars de moins que les autres huiles végétales. Cette huile représente actuellement une part de 38% parmi l'ensemble des huiles végétales consommées dans le monde. C'est une huile polyvalente, très productive et qui permet de créer de nombreux emplois, du petit producteur aux grosses entreprises. Elle représente même parfois un moyen pour certaines populations locales un moyen de sortir de l'extrême pauvreté.

Comme expliqué précédemment, l'Indonésie et la Malaisie sont aujourd'hui les deux plus gros producteurs d'huile de palme. Ils fournissent 85% de la consommation mondiale. Chaque année, la production d'huile de palme atteint les 15 millions de tonnes. Sauf que cela a un coût. En effet, des opérations de déforestation sont engagées depuis de nombreuses années afin de permettre une culture unique (monoculture) de manière intensive et extrême.

L'Indonésie a déjà perdu plus de 72% de ses forêts. D'ici 2022, les Nations Unies estiment que cette perte montera jusqu'à 98%. Environ 24 millions d'hectares de forêts tropicales humides ont été détruits entre 1990 et 2015 selon le Ministère indonésien de l'environnement et des forêts. Le problème ne vient donc pas de l'huile de palme en elle-même, mais plutôt du lieu et de la façon dont elle est cultivée. En plus de la déforestation massive, la croissance exponentielle de la production d'huile de palme entraîne de nombreux conflits avec les communautés concernées.

La déforestation a de nombreuses conséquences dramatiques sur la biodiversité. L'Indonésie abrite plus d'espèces menacées ou en danger que n'importe quel autre pays au monde. Ainsi, l'orang-outan, les éléphants de forêts et le tigre de Sumatra, parmi d'autres, sont largement menacés par la déforestation qui entraîne principalement la destruction de leur habitat.

Sur l'île indonésienne de Bornéo, au moins 30% des forêts fluviales ont été détruites depuis les années 1980. Cela comprend aussi certaines tourbières qui peuvent stocker deux fois plus de carbone que les forêts. Bornéo a actuellement perdu 150 000 orangs-outans depuis 2000. Selon Greenpeace, chaque jour, ce sont 25 orangs-outans qui sont sacrifiés au détriment de l'huile de palme. Lorsqu'une nouvelle plantation de palmier à huile apparaît, elle est responsable d'une réduction de minimum 90% de la biodiversité de la forêt tropicale qu'elle remplace. Mais la destruction des écosystèmes n'est pas sans conséquence au niveau mondial. Cela provoque une dérégulation des systèmes de vie et conduit à divers problèmes environnementaux et économiques.

Si l'Indonésie et la Malaisie ne voient qu'à court terme, elles risquent principalement de voir leurs terres se stériliser et déréguler en conséquence leur environnement. Avec la possibilité du développement de bactéries et d'insectes potentiellement dangereux pour l'Homme, la faune et la flore, auparavant éliminés grâce aux espèces comme l'orang-outan. Certaines maladies, comme le paludisme, que l'on croît maîtrisées, pourraient se propager au niveau mondial.

Selon Greenpeace, en 2019, les incendies relatifs à la déforestation en Indonésie ont entraîné une détresse de la population locale. Plus de 900 000 personnes ont souffert d'infections respiratoires en raison des nuages de fumée. Près de 10 millions d'enfants risquent de subir des dommages physiques et cognitifs à cause de la pollution de l'air.

Certaines communautés autochtones, comme le peuple Dayak, ont dû être déplacées alors qu'elles dépendent de la forêt pour survivre. La culture et le mode de vie de ces peuples sont largement menacés par le développement de la production de l'huile de palme.

Selon une étude d'Amnesty International, de nombreux enfants très jeunes ainsi que des femmes travaillent dans des conditions déplorables dans les exploitations de palmiers à huile. Le travail, en plus d'être dangereux, est sous-payé et entraîne une déscolarisation des enfants. Les travailleurs sont aussi soumis à des produits toxiques comme les pesticides qui provoquent des lésions incurables.

L'expansion de la production d'huile de palme dans le monde a provoqué une augmentation de la pollution des sols et des eaux, mais aussi de l'atmosphère. En 2015, la culture sur brûlis (technique agricole qui utilise le feu pour créer le champ) a provoqué l'apparition de nuages de fumée majeurs. Au niveau mondial, la déforestation est la cause de 12% des émissions de gaz à effet de serre (GES). L'Indonésie est devenue l'un des plus gros pollueurs de la planète, pour atteindre la cinquième place du podium en 2017, derrière les Etats-Unis, la Chine, la Russie et le Brésil.

En particulier, la déforestation est une cause indirecte du réchauffement climatique. Plus les arbres disparaîtront, plus le processus de réchauffement s'accélérera, ceux-ci étant parfois nommés le "poumon de la planète". En effet, le processus de captation du carbone dans l'atmosphère diminue proportionnellement à la disparition des arbres. De grandes parties de la forêt indonésienne poussent dans une tourbe marécageuse qui permet de stocker de grandes quantités de CO2. En drainant la tourbe et en provoquant des incendies incontrôlables, les compagnies d'huile de palme libèrent ce carbone. Entre 2015 et 2018, Greenpeace a calculé que près de 2 gigatonnes de CO2 ont été libérées à cause des incendies.

Pour agir face à cette production exponentielle, un des moyens les plus simples et pourtant efficaces est de réduire sa consommation d'huile de palme au quotidien. Cependant, cela reste parfois complexe puisque de nombreux produits industriels ne mentionnent pas toujours la présence d'huile de palme ou la dissimulent sous l'appellation "huile végétale". En tant que consommateur, il est donc possible de boycotter ou de limiter la consommation de produits à base d'huile de palme en se renseignant sur des sites associatifs ou des applications qui affichent la liste des ingrédients d'un produit en détail. Si au fil du temps la demande diminue, les producteurs pourraient réduire leurs exploitations. Avant cela, il est important de repenser nos systèmes alimentaires pour les tendre vers des productions centrées sur le local et la durabilité.

Bien que l'huile de palme soit à l'origine de nombreux problèmes environnementaux, économiques ou politiques, il ne faut pas pour autant la supprimer. Pourquoi ? Il ne faut pas éliminer complètement les exploitations d'huile de palme, mais uniquement celles qui provoquent de la déforestation massive (forêts et tourbières). C'est pour cette raison que les entreprises doivent faire leur maximum pour identifier la provenance de l'huile de palme qu'elles utilisent.

De plus, substituer de l'huile de palme par une autre huile végétale ne serait pas sans conséquence sur l'environnement. Il faut donc envisager ce cas attentivement avant de prendre des décisions. Le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) indique qu’un hectare fournit par an 4 tonnes d’huiles de palme, soit 7 à 10 fois plus que ses concurrents comme le soja, le colza et le tournesol. Or, la demande en huile augmente chaque année de 3%. Remplacer l’huile de palme par des cultures au rendement plus faible impliquerait d’augmenter la surface des terres arables et donc d’intensifier la déforestation.

Oui, c'est totalement possible. Pour cela, un producteur d'huile de palme doit appliquer une méthode scientifique précise de manière très rigoureuse. Il s'agit de la High Carbon Stock (HCS). S'il applique cette méthode pour ses nouvelles concessions, alors l'huile de palme produite ne contribuera pas à la déforestation. C'est aujourd'hui l'unique méthode qui permet aux industriels de remplir leurs engagements de "Zéro Déforestation" dans leurs approvisionnements. Pour mettre en œuvre ce type d'engagement, il y a deux critères primordiaux : la transparence et la traçabilité.

La certification de chaîne d'approvisionnement RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil) a été pensée afin d'attester du fait que l'huile de palme approvisionnée est durable (économiquement viable, écologiquement appropriée et socialement bénéfique). Le problème, c'est que cette certification ne garantit par l'absence de déforestation. Pour Greenpeace, elle n'est donc pas suffisante pour qualifier une huile de palme durable.

L'huile de palme est aujourd'hui difficile à égaler en termes de rendement. L'approvisionnement responsable en huile de palme est un défi majeur pour les années à venir. Cela concerne aussi bien les producteurs que les consommateurs, en passant par tous les intermédiaires. Si vous souhaitez faire un premier pas dans une consommation sans huile de palme, vous pouvez visiter notre boutique en ligne. Nous proposons des produits cosmétiques (shampoings, savons, baumes, crèmes, etc.) sans huile de palme.